Les Hauts Banquets à Cavaillon : empêcher l’irréparable.

 

La municipalité de Cavaillon et la Communauté d’agglomération Luberon Monts de Vaucluse (LMV), conduites, aujourd’hui par Monsieur Gérard DAUDET, poursuivent depuis plus de 10 ans, le projet d’implanter, au sud de Cavaillon, une zone d’activité principalement consacrée aux activités logistiques. Leur objectif est d’artificialiser, à terme, 120 hectares de terres agricoles de grande qualité, irriguées, historiquement consacrées principalement au maraichage (dont le fameux melon, élément majeur de l’identité de la ville). La ZAC des Hauts Banquets, première opération de ce projet concerne une superficie de 45 hectares.

Or ces terrains, en rive droite de la Durance, sont en zone inondable, considérée comme étant particulièrement dangereuse. Les règles d’urbanisme ne permettant pas d’y construire, la Ville et LMV ont décidé de surmonter cet obstacle en employant les grands moyens. Vers 2010, décision a été prise de construire à Cheval-Blanc, la Digue des Iscles de Milan. Cet ouvrage considérable, d’un coût de plus de 4 millions d’euros, est censé protéger le secteur d’implantation de la ZAC et créer les conditions pour faire lever les interdictions de construire.

Mais le projet a soulevé de fortes oppositions. Il conjugue, en effet, un nombre impressionnant d’aspects négatifs :

  • Le sacrifice massif de terres à vocation agricole interdirait, à l’avenir, le retour à une production alimentaire de proximité, pourtant de plus en plus indispensable à notre époque.

  • L’artificialisation et l’imperméabilisation à grande échelle perturberaient gravement l’écosystème, porteraient atteinte à la biodiversité.

  • Les circulations intenses de poids lourds occasionneraient des pollutions aériennes et sonores.

  • La construction de bâtiments (entrepôts, bureaux) en zone inondable ferait courir, lors des crues, des risques encore aggravés par le changement climatique, comme on vient de le voir dans les Alpes Maritimes

Malgré celà, la Ville et LMV, avec l’appui constant de la Préfecture de Vaucluse et le soutien financier du Département et de la Région, se sont acharnés à poursuivre le projet en multipliant les procédures pour aboutir à leur fin. Les citoyens alertés, se sont manifestés tout au long de ces années, pour s’y opposer :

  • En 2016, les associations L’Etang Nouveau et la Confédération Paysanne 84, membres du collectif « La Voguette », ont déposé des recours contre l’arrêté préfectoral autorisant la construction de la Digue ; elles ont tenté de faire suspendre les travaux. Malgré cela, le Digue a été achevée en 2017

  • De 2018 à 2020, on a pu assister à un véritable « festival de procédures » :

    • En juillet 2018, la future opération a été concédée à un aménageur privé, le groupe IDEC et sa filiale Faubourg Promotion

    • Les documents d’urbanisme, qui empêchaient la construction, ont été révisés, le SCOT (schéma de cohérence territoriale) en 2018 et le PLU (plan local d’urbanisme ) en 2019

    • Le PPRI (plan de protection contre le risque d’inondation) de la Basse Durance, qui interdit les aménagements et constructions en zone inondable a été révisé en 2019, pour la seule Commune de Cavaillon, afin de supprimer l’interdiction dans le secteur sud de la Ville.

    • Le Préfet de Vaucluse a pris, le 2 avril 2019, un arrêté accordant l’autorisation environnementale.

    • Par arrêtés du 8 janvier et du 11 février 2020, le Préfet de Vaucluse a déclaré le projet d’utilité publique, permettant l’acquisition de terrains par voie d’expropriation

    • En octobre 2020, LMV a lancé une consultation publique par voie électronique sur le projet de ZAC des Hauts Banquets et, dans la foulée, a délibéré à huis clos, le 10 décembre 2020 pour approuver les dossiers de création et de réalisation de la ZAC des Hauts Banquets, ainsi que le programme des Equipements Publics

    • Parallèlement, en novembre 2020, la Ville de Cavaillon a lancé une enquête publique en vue du déclassement du chemin rural de la Voguette, pour permettre la réalisation des voieries de la ZAC

Face à une telle profusion, l’opposition au projet s’est largement développée : au cours des différentes enquêtes publiques, de plus en plus de personnes sont venus manifester leur mécontentement et déployer leurs arguments. Les associations, en plus grand nombre, se sont organisées pour faire face et se sont regroupées dans le collectif Sauvons Nos Terres 84. SOS Durance Vivante, dès sa création en 2020, est ainsi venue rejoindre l’Etang Nouveau, la Confédération Paysanne 84, Foll’Avoine, AVEC, FNE 84 et Luberon Nature, pour amplifier la protestation et organiser la riposte.

Nous avons décidé de lancer des recours contre plusieurs des actes de la procédure :

  • La révision du PPRI (arrêté préfectoral du 3 octobre 2019)

  • La déclaration d’utilité publique (arrêtés préfectoraux des 8 janvier et 11 février 2020)

  • Les dossiers de création et réalisation de la ZAC ainsi que le programme des équipements publics (délibérations LMB du 10 décembre 2020)

Nous avons, également, mis en place, sur le site Hello Asso, une collecte de fonds pour financer ces actions, avec un grand succès.

Face au rouleau-compresseur de ce projet particulièrement nuisible malgré l’appellation trompeuse de Natura Lub, dont l’utilité économique est loin d’être démontrée , les chiffres annoncés en matière de création d’emploi ne reposant sur aucune réalité, il est essentiel de mobiliser, le plus vite possible, la maximum de forces. Le redoublement de nos efforts commence à porter ses fruits : plusieurs organismes publics, dont la Mission Régionale d‘Autorité Environnementale, ont souligné les lacunes et les insuffisances du dossier, des commissaires-enquêteurs ont émis des réserves et, pour la première fois su ce projet, la commissaire-enquêteur a donné un avis défavorable au déclassement du chemin de la Voguette.

Cela confirme, à la fois, que le caractère inacceptable d’un tel projet finit par transparaître, y compris dans les actes de la procédure officielle, malgré tous les efforts de la Mairie de Cavaillon, de LMV et de leur appuis préfectoraux et la nécessité d’aller encore plus loin dans l’action pour faire prévaloir le droit et savoir raison garder face à la furie bétonneuse.

D’autres projets, tout aussi inquiétants, comme c’est le cas aujourd’hui à Pertuis, voient le jour

Nous invitons tous ceux qui le souhaitent, à nous rejoindre dans ces combats cruciaux.

Rédigé le 1er février 2021